23. Nouvelles de mars

10 mars 1917: Mes bien chers Amis, quel bonheur m’a causĂ© votre bonne lettre du 10/12/17 que je viens de recevoir aujourd’hui mĂȘme ! Je n’exagĂšre pas en vous disant que je l’ai dĂ©jĂ  lue pour le moins cinquante fois. Chaque mot m’a valu un litre de bon sang. Comme je suis heureux de vous savoir […]



10 mars 1917:

Mes bien chers Amis, quel bonheur m’a causĂ© votre bonne lettre du 10/12/17 que je viens de recevoir aujourd’hui mĂȘme ! Je n’exagĂšre pas en vous disant que je l’ai dĂ©jĂ  lue pour le moins cinquante fois. Chaque mot m’a valu un litre de bon sang. Comme je suis heureux de vous savoir (Ă  cette date là !) tous en bonne santĂ©. Oui c’est la plus grande grĂące que Dieu puisse me donner, celle de vous conserver tous Ă  mon amour. Puisse-t-il vous protĂ©ger indemne durant toute l’horrible pĂ©riode que nous traversons. Merci du plus profond de mon cƓur pour vos vƓux si ardents que vous m’adressez Ă  l’occasion du nouvel an. A chaque occasion je prie la divine Providence pour qu’elle vous protĂšge et vous aide Ă  supporter les lourds sacrifices du moment. Quant Ă  moi, mes biens chers Amis, je supporte vaillamment les souffrances et les privations multiples rien qu’à la pensĂ©e que le fruit de toutes ces peines sera l’ultime bonheur de vous revoir et de vous embrasser. Depuis deux ans, je n’ai pas connu un seul instant de dĂ©couragement ! Ce don, je l’attribue Ă  vos bonnes priĂšres que vous adressez au ciel pour moi ! Comme je vous l’ai dis dans mes prĂ©cĂ©dentes lettres, j’ai la ferme conviction que cette annĂ©e ne se passera pas sans que nous n’ayons la joie de nous revoir ! Vous me demandez si je n’ai pas eu trop Ă  souffrir du froid. A ce sujet je n’ai pas trop Ă  me plaindre malgrĂ© l’hiver rigoureux que nous avons eu mais nĂ©anmoins nous sommes heureux que la saison touche Ă  sa fin ! Notre vie depuis de long mois dĂ©jĂ  nous a rudement endurci le corps !!!

Enfin je m’aperçois que malgrĂ© mes supplications, certain ont trouvĂ© un immense besoin de vous annoncer avec empressement que j’avais Ă©tĂ© malade. Pour les quelques jours que j’ai passĂ© Ă  l’hopital vraiment cela n’en valait pas la peine ! Eh bien je vais vous dire carrĂ©ment ce que j’ai eu, une anthrasce [ndlr. l’anthrax, infection staphylococcique], une sĂ©rie de 14 clous dans les reins ! Et j’en ai Ă©tĂ© quitte en six semaines de temps et cela se passait en Juin 1916. Avouez que ce n’était pas la peine d’augmenter vos inquiĂ©tudes en vous parlant de ce petit bobΠ! Vous voilĂ  donc tranquille hein et l’incident clos ! Le 4 janvier j’ai reçu vos lettres du 9 et 27 Novembre et au dĂ©but de FĂ©vrier j’ai la joie de recevoir votre photo, que j’ai trouvĂ© cependant assez mal rĂ©ussie. J’ai appris avec grande satisfaction l’affaire Henri, malheureusement je suis portĂ© Ă  croire qu’ils sont toujours lĂ -bas puisque je n’ai pas jusqu’à prĂ©sent d’autres nouvelles Ă  ce sujet. C’eut Ă©tĂ© cependant pour moi un grand bonheur ! Les amis AndrĂ©, Luc, Henri, Fred, Albert se portent Ă  merveille. Je termine cette trop courte lettre en vous embrassant indistinctement bien fort.

Jeanne [Jean Vanden Dael signe ici sous le pseudonyme de Jeanne (Delavallée)]